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Je bois un peu? Beaucoup? Trop?

Le passage à l’université permet de vivre de nombreuses expériences sur les plans scolaire, affectif et social; ces expériences étant à la fois des occasions d’apprentissage et de plaisir. Par ailleurs, une session d’études comporte aussi son lot de stress. Des émotions, positives ou négatives, parfois fortes, peuvent y être vécues. Par exemple, plusieurs vivront ailleurs que chez leurs parents pour la première fois: cette nouvelle liberté peut conduire à l’isolement ou à un excès d’activités sociales. On peut penser aussi aux frustrations d’un travail d’équipe, à un examen difficile, à un échec, à la pression du temps pour les travaux, aux conflits interpersonnels; sans compter la sollicitation intellectuelle qui est importante durant une session d’études. Toutes ces situations peuvent conduire à utiliser l’alcool comme un exutoire. Pour minimiser ce risque, il est souvent utile d’aborder ses expériences de consommation d’alcool en ayant la connaissance et la préparation nécessaires.

Dans ce texte, il sera question de la consommation d’alcool lors des partys ou des activités en tout genre qui ponctuent la vie universitaire. En effet, pour que la consommation d’alcool demeure saine et conserve sa fonction de catalyseur social, il est important d’en connaître les tenants et aboutissants et d’être au clair avec les motivations qui nous animent.

L’alcoolémie et ses effets

L’alcoolémie est le taux d’alcool en circulation dans le sang. Plusieurs facteurs influencent l’alcoolémie: le sexe, la taille, le poids, la corpulence, le métabolisme du consommateur, la quantité d’alcool absorbée, la vitesse à laquelle l’alcool est ingurgité et le type et la quantité d’aliments présents dans l’estomac.

Une fois l’alcool ingéré, il séjourne dans l’estomac puis dans l’intestin grêle. Par la suite, il passe très rapidement dans le sang vers les organes, les plus atteints étant le cerveau, les poumons et le foie.

Le cerveau est l’organe où l’effet de l’alcool est le plus rapidement observé. Dans un premier temps, l’effet est ressenti de façon favorable, car il entraîne une réduction de stress ou d’inhibition. Par la suite, quand le taux d’alcool augmente, le temps de réaction est allongé et il y a apparition du trouble de la coordination. L’intoxication entraîne aussi une altération de la pensée, du jugement, du langage et des sens. Les capacités cognitives diminuent, ainsi que les capacités à résoudre des conflits.

Le «calage»

Peu importe la quantité consommée, le foie ne peut métaboliser que 15 ou 17 mg d’alcool à l’heure. Cela représente approximativement une bière, un verre de vin ou une once d’alcool à l’heure. L’alcool ingurgité trop rapidement surcharge le foie qui travaille très lentement. Le surplus d’alcool séjourne longtemps dans l’organisme et, selon la quantité absorbée, l’alcoolémie peut monter très rapidement en une heure.

Voici la progression du taux d’alcool et les effets associés:

50 à 100 mg Faible intoxication et légère euphorie
100 à 200 mg État d’ébriété et intoxication moyenne
200 à 300 mg Ivresse avancée et intoxication grave
300 à 400 mg Danger – intoxication très grave
400 à 500 mg Coma éthylique – risque de mort si aucune aide n’est apportée

Les mélanges

L’alcool est parfois consommé avec d’autres substances et le seul mélange «heureux» est celui avec la nourriture. En effet, plus la nourriture est grasse, plus lent est le passage de l’alcool de l’estomac à l’intestin et plus long est le temps d’assimilation de l’alcool, ce qui diminue l’alcoolémie d’un individu.

Le mélange alcool et boissons énergisantes donne l’impression d’une diminution de l’effet de l’alcool, mais ne change en rien l’alcoolémie. On peut donc surestimer ses capacités à conduire ou à prendre des décisions alors qu’en fait on est intoxiqué. De plus, comme l’on ressent moins ses effets, on consomme davantage d’alcool. Enfin, les boissons énergisantes peuvent causer la déshydratation, tout comme l’alcool. Si, de surcroît, on consomme dans un contexte où il fait chaud, on s’expose à une bonne augmentation des symptômes du lendemain de veille.

Quant au mélange alcool et drogues stimulantes telles que speed, ecstasy ou cocaïne, il s’avère lui aussi dangereux, car les propriétés d’une substance risquent de supprimer ou d’atténuer les effets de l’autre. Il peut se créer une synergie additive qui augmente le risque de surdose. Par exemple, consommer de l’alcool avec de la cocaïne accroit la vitesse de consommation d’alcool et sa vitesse de diffusion dans le corps. D’un autre côté, la cocaïne vient contrecarrer l’effet sédatif de l’alcool, ce qui peut entraîner une plus grande consommation.

Pour ce qui est de l’alcool et du cannabis, il s’agit d’un mélange amplificateur, c’est-à-dire que l’effet dépresseur de l’alcool et ceux du cannabis sont multipliés. Le jugement, le temps de réaction et la coordination sont les principaux systèmes touchés. Le cannabis affecte la partie du tronc cérébral associée aux sensations de nausées et de vomissements. Ainsi, la combinaison alcool et cannabis peut s’avérer particulièrement dangereuse quand l’intoxication à l’alcool devient trop importante et que la personne n’a plus le réflexe de vomir.

De tous les mélanges, le plus dangereux est celui de l’alcool, qui est un sédatif, avec un autre sédatif (barbituriques, benzodiazépines, antidépresseurs, antihistaminiques, mescaline, mess, horse, angel dust, TH, spécial K, vitamine K, ket, ketty). Il se crée alors une synergie renforçatrice, c’est-à-dire que l’effet de la combinaison est supérieur à la somme des effets pris séparément. Ce mélange peut engendrer une dépression extrême du système nerveux central pouvant aller jusqu’à l’inconscience et la mort.

Les effets de la consommation abusive d’alcool

Les effets de l’abus d’alcool se regroupent en 3 catégories: les effets physiques, les effets psychologiques et les effets sur l’environnement social. En ce qui a trait aux effets physiques, abuser de l’alcool affecte à peu près tous les organes et tous les systèmes de l’organisme, dont l’œsophage, l’estomac, les intestins, le foie, le pancréas, le cœur, les artères et le système nerveux. L’alcool est un produit neurotoxique qui endommage le corps humain.

Voici 2 séries d’images saisissantes (tirées du site AlcoolEspace):

 IRM d'un cerveau non buveur IRM d'un cerveau buveur

Activité neuronale d’un jeune de 15 ans non buveur à gauche et buveur à droite. Sous l’emprise de l’alcool (à droite), le cerveau du jeune n’est pas en mesure de réfléchir normalement, encore moins de faire preuve de jugement (idem chez les adultes). Source: New York Times: Grim Neurology of Teenage Drinking

Alcool et cerveau, IRM:

IRM d'un cerveau

Comparaison entre l’IRM de deux hommes de 43 ans: l’un normal, l’autre alcoolique. Le cerveau de l’homme alcoolique à droite est massivement rétréci en raison de la perte de cellules.

Pour ce qui est des effets psychologiques, force est de constater qu’il existe une relation entre un mode de consommation inadapté et des troubles psychologiques. L’abus d’alcool répété induit ou aggrave des troubles dépressifs marqués par une baisse d’intérêt général, une augmentation de la tristesse, des troubles du sommeil et de la fatigue. Il crée ou aggrave également des symptômes liés à l’anxiété qui se caractérisent par des craintes excessives sans raison apparente. L’abus d’alcool peut provoquer des perturbations de la vie affective et du caractère. Ces perturbations s’observent notamment dans l’incapacité à apprécier les rapports sociaux.

Quant aux effets sur l’environnement social, l’abus d’alcool présente son lot d’inconvénients et il est associé à l’adoption d’une conduite automobile dangereuse, au fait de devoir faire face à la justice, aux jeux de hasard, à la violence physique et sexuelle, aux relations sexuelles non protégées. La honte et la culpabilité, déjà inhérentes à une consommation abusive, s’en trouvent amplifiées lorsque, le lendemain de ce genre de situations, l’individu constate jusqu’où l’alcool l’a mené. Les erreurs de la veille peuvent être lourdes de conséquences. À long terme, la perte de bons amis peut s’avérer probable. Les problèmes financiers, le rendement scolaire atténué et la naissance d’un bébé atteint d’un syndrome d’alcoolisme fœtal sont également des conséquences à envisager.

Une consommation raisonnable et responsable

Afin de se situer par rapport à l’alcool, il est intéressant d’établir son profil de consommation. Pour ce faire, il suffit de s’interroger sur la fréquence, les quantités absorbées, les occasions, les motivations et les sommes d’argent investies. Un tableau hebdomadaire ou mensuel permet d’avoir une vue globale et objective.

Selon le Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances, «il existe de continuum de risque selon lequel le risque pour ceux qui consomment deux verres standards ou moins par semaine est faible, il est modéré pour ceux qui consomment entre trois et six verres standards par semaine et il est élevé pour ceux qui consomment plus de six verres standards par semaine. Au Canada, un verre standard contient 17.05 millilitres d’alcool pur, ce qui équivaut à une bouteille de bière ou de cidre (12 oz, à 5% d’alcool, un verre de vin (5 oz à 12% d’alcool) ou de spiritueux (1,5 oz à 40% d’alcool)». Cette infographie des repères canadiens sur l’alcool et la santé résume bien les nouvelles recommandations.

La décision de boire vous appartient. Si vous décidez de consommer de l’alcool, faites-le de manière équilibrée et responsable. Quand vous recevez des amis à la maison, buvez de façon modérée tout en vous assurant que vos invités font de même. Il s’agit d’une marque de respect envers toutes les personnes présentes. Pour ceux qui se déplacent, vérifiez s’ils ont prévu un transport sécuritaire pour le retour (chauffeur désigné, transport en commun, parent, etc.) et indiquez-leur clairement si vous pouvez les héberger pour une nuit ou non. Ayez la même prévoyance à votre égard si vous sortez seul ou avec d’autres. Évitez de participer à des séances de calage ou d’en organiser: elles méritent d’être dénoncées.

Tendance à exagérer: qu’est-ce qui m’arrive?

Les pièges de la consomation d’alcool sont nombreux et il est facile de se faire prendre. En effet, la consommation exagérée d’alcool est souvent une façon inappropriée de régler un problème. À cela s’ajoute l’installation graduelle d’une dépendance physique et psychologique qui alimente la répétition. Le piège vient alors de se refermer.

Une méta-analyse d’études sur la consommation d’alcool avait ramené à 4 les questions à se poser pour identifier un problème possible d’alcool. Les voici:

Questionnaire CAGE/DETA

1 Avez-vous déjà ressenti le besoin de DIMINUER votre consommation d’alcool?
2 Votre ENTOURAGE vous a-t-il déjà fait des remarques au sujet de votre consommation d’alcool?
3 Avez-vous déjà eu l’impression que vous buviez TROP? (culpabilité ou honte)?
4 Avez-vous déjà eu besoin d’ALCOOL le matin pour vous sentir en forme?
  2 réponses positives ou plus révèlent un problème d’alcool éventuel

On peut aussi recourir au questionnaire AUDIT (Alcohol Use Disorders Identification Test). Il comporte quelques questions en plus, mais son efficacité à identifier les consommateurs à risques est plus grande.

Il importe donc de se questionner tôt sur nos habitudes et nos motivations par rapport à l’alcool, ce qui rendra plus facile la modification de notre comportement. Prenez le temps de vérifier si vous n’avez pas mis en place une solution qui pourrait elle-même devenir un problème.

Si c’est le cas, cherchez à comprendre ce qui s’est passé en vous. Peut-être avez-vous de la difficulté à bien gérer vos émotions et que, chaque fois que vous êtes un peu fébrile, positivement ou négativement, vous êtes porté à arroser ça? Peut-être voulez-vous profiter de la détente occasionnée par les premiers verres pour diminuer votre stress ou votre anxiété? Peut-être aussi utilisez-vous l’effet désinhibiteur de l’alcool pour masquer le trac ou la gêne ressentie à l’idée d’avoir des relations interpersonnelles?

Si une de ces situations (ou une autre) vous a conduit à une consommation abusive d’alcool, essayez de trouver des méthodes plus saines et plus profitables pour vous avant qu’il ne soit trop tard. Si vous n’y arrivez pas, consultez des ressources d’aide spécialisées dans le domaine. Des références apparaissent ci-dessous.

Références

Pour recevoir de l’aide

Sites consultés

Rédigé par: Mylène Bussières, psychologue

Avec les contributions de: Daniel Tremblay, conseiller d’orientation et Louise Turgeon, conseillère d’orientation

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