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Le perfectionnisme: quand le mieux devient l’ennemi du bien

Les études universitaires invitent les individus à faire de leur mieux et à se dépasser. La personne qui désire obtenir du succès dans ses études se doit, rendue à ce niveau, d’être un tant soit peu méticuleuse et apte à fournir des efforts intellectuels soutenus.

Cependant, nous remarquons que plusieurs étudiants entretiennent des niveaux d’attentes irréalistes et s’imposent des standards personnels extrêmes. Le perfectionnisme ne correspond pas à la recherche de l’excellence, il correspond à la recherche de l’inatteignable, de l’inaccessible.

Suis-je une personne consciencieuse ou perfectionniste?

La personne consciencieuse s’impose des standards d’excellence humainement possibles à atteindre. Elle sait doser ses efforts et établir ses priorités sans toutefois négliger l’importance des détails. Elle demeure flexible et sait ajuster ses propres exigences selon le contexte ou l’importance de l’activité. Elle est autocritique, accepte ses propres erreurs et cherche à les corriger. Elle éprouve du plaisir et de la satisfaction dans la réalisation de ses projets et dans l’atteinte de ses objectifs personnels. Elle entrevoit l’avenir de façon réaliste et cherche à prévenir les difficultés. Si celles-ci surgissent, elle cherche et met en place des solutions.

La personne perfectionniste s’impose des standards d’excellence extrêmement difficiles à atteindre, voire impossibles. Elle ne sait doser ses efforts, se surinvestissant parfois dans des activités de moindre importance au détriment de certaines plus prioritaires. Pour elle, les détails comptent autant que l’ensemble et elle demeure inflexible dans le choix de ses priorités et de ses façons de faire. La personne perfectionniste a de la difficulté à travailler en équipe et à déléguer. Elle doute constamment d’elle-même et n’accepte pas ses limites et ses imperfections. Sa valeur en tant que personne dépend de ses succès et de sa réussite. Elle se juge sévèrement et accepte mal la critique. La moindre erreur est vécue comme une cuisante défaite. La personne perfectionniste est une éternelle insatisfaite et ressent très souvent de l’anxiété, de la honte et de la culpabilité. Elle appréhende l’avenir et redoute l’échec.

Comment devient-on perfectionniste?

Le perfectionnisme se développerait sous l’influence de 3 facteurs: génétique, familial et culturel. De nombreuses recherches tendent à démontrer que plusieurs traits de personnalité, tel que le perfectionnisme, sont héréditaires. Nous venons au monde avec un tempérament et certaines personnes seraient davantage prédisposées que d’autres au perfectionnisme. Par la suite, toutefois, notre personnalité se forge à partir des expériences vécues dans notre environnement.

Beaucoup de perfectionnistes sont élevés par des parents qui ont des exigences personnelles très élevées. Ces parents peuvent transmettre, de manière directe ou de manière subtile, leur façon de voir et leur comportement. Leurs enfants grandissent alors souvent dans la crainte de ne pouvoir répondre à leurs attentes et de les décevoir. D’ailleurs, plusieurs perfectionnistes ont l’impression que leurs parents ne les aimeront qu’à la condition qu’ils ou elles atteignent leurs critères de réussite.

Enfin, nous devons l’admettre, nous vivons maintenant dans une société qui aime davantage l’excellence et la valorise. La couverture médiatique des Jeux olympiques et du Festival de Cannes, ainsi que la télédiffusion de remises de prix en tout genre le démontrent bien. Nous félicitons et admirons les gens qui accomplissent des performances exceptionnelles. Cette recherche de l’excellence est très présente dans les milieux scolaires où la réussite est encouragée et récompensée. Cependant, s’il est important de souligner et de gratifier les gens qui, avec beaucoup d’efforts et d’acharnement, ont réalisé de grandes choses, il semble impératif de s’interroger sur les conséquences de cette quête et de cette démonstration continuelle de l’excellence.

Les effets pervers du perfectionnisme

La recherche effrénée de la perfection est lourde de conséquences pour les étudiants. Nous observons couramment une baisse de rendement chez ces perfectionnistes, certains en arrivent même à abandonner leurs études. Des troubles de santé font fréquemment leur apparition. Les perfectionnistes présentent souvent des symptômes dépressifs: plus rien ne les satisfait, ils se retirent et ne sont plus intéressés à rencontrer des gens. Leurs objectifs n’étant jamais atteints parce que trop élevés, ils n’arrivent pas à développer leur confiance en soi.

Ces étudiants peuvent aussi développer des problèmes d’anxiété importants qui entraînent des difficultés de concentration et de mémorisation. L’étude devient alors plus pénible et moins efficace. Devant ce calvaire, plusieurs auront tendance à remettre à plus tard leur étude et à repousser les échéances. À l’opposé, d’autres s’acharneront sans merci sur leurs études sans toutefois réussir à se concentrer adéquatement. Ils développeront parfois un problème d’anxiété aux examens qui se caractérise par des troubles de l’attention et des trous de mémoire. Ces étudiants n’arrivent plus à mettre sur papier ce qu’ils ont pourtant bien appris et obtiennent des résultats bien inférieurs à ceux qu’ils auraient pu obtenir.

En résumé, lorsque les perfectionnistes prennent conscience que leurs résultats ne leur permettront pas d’accéder à leur rêve d’exceller de façon exceptionnelle, ils réagissent par un sentiment de frustration, de colère, de dépression ou de panique.

Comment cesse-t-on d’être perfectionniste?

Les attitudes et les comportements perfectionnistes ne se modifient pas toujours aisément. Cependant, certaines réflexions et certaines actions peuvent vous aider à le faire.

Prendre conscience de l’aspect néfaste du perfectionnisme

Si l’on désire surmonter son perfectionnisme, il faut, en tout premier lieu, prendre conscience des effets néfastes du perfectionnisme. Pour ce faire, dressez la liste des avantages et des inconvénients qu’entraîne la recherche de la perfection. Vous pouvez, par exemple, vous demander si vous obtenez nécessairement de meilleurs résultats lorsque vous vous fixez des objectifs très élevés. Après cet exercice, vous constaterez fort probablement que cette recherche rapporte bien peu pour ce qu’elle vous en coûte.

Remettre en question votre système de valeur

Les perfectionnistes adoptent souvent un système de valeur basé sur l’accomplissement et la réussite. Pour plusieurs, leur valeur en tant qu’individu est directement reliée à l’importance de leurs réalisations. Les étudiants perfectionnistes croient que s’ils produisent des travaux de qualité, cela signifie qu’ils ou elles sont de bonnes personnes. Il est important de distinguer notre valeur personnelle de nos actes. Tout être humain a de la valeur bien qu’il subisse parfois des échecs.

Modifier votre mode de pensée

On retrouve à l’origine du perfectionnisme un mode de raisonnement souvent incohérent et erroné. La philosophie du «tout ou rien» est très présente chez les perfectionnistes. Des pensées telles que «si mon travail n’est pas parfait, il ne vaut rien» et «je dois exceller en tout» sont courantes. La personne qui adopte cette philosophie fait peu de nuance, se perçoit comme un échec et a peu d’estime d’elle-même.

Les perfectionnistes ont également tendance à tout généraliser. Ils voient dans un événement négatif isolé l’illustration de ce qui leur arrive tout le temps. Il leur suffit d’un test échoué pour conclure aussitôt qu’ils ou elles ratent toujours leurs examens et n’arriveront jamais à compléter leurs études.

Enfin, les personnes obsédées de la perfection ont tendance à motiver leurs actions exclusivement en termes de responsabilité. Des phrases telles que «il faut que j’étudie lors de tous mes temps libres», «je dois être premier de classe» et «je ne dois pas obtenir une moyenne cumulative inférieure à 4,0» deviennent leur leitmotiv.

Ces différentes déformations de la pensée sont très nuisibles et il est important de les combattre si l’on veut surmonter son perfectionnisme. Pour ce faire, notez sur papier ses pensées, identifiez celles qui sont erronées et remplacez-les par des pensées plus nuancées, plus objectives et plus valorisantes. Par exemple, vous pouvez remplacer l’idée que vous devez obtenir 90% à votre prochain examen par l’idée que vous allez essayer de donner tout ce qui est en votre pouvoir afin de faire ressortir le maximum de connaissances acquises. Pour plus d’information à ce sujet, nous vous invitons à lire le texte Stress, anxiété et perceptions.

Se fixer des objectifs réalistes et demeurer flexible

Les perfectionnistes poursuivent des objectifs irréalistes et refusent d’y déroger. Cette poursuite est génératrice d’anxiété et les amène à reporter à plus tard leurs tâches scolaires. Réviser et modifier vos objectifs afin de les rendre accessibles est un premier pas dans la bonne direction. Plutôt que d’exiger de vous-même de rédiger en un seul jet la version définitive de votre travail, vous pourriez, par exemple, vous fixer comme but de faire un brouillon que vous réviseriez par la suite.

La personne qui poursuit des objectifs atteignables et qui ajuste ses propres exigences en fonction des circonstances cumulera des gains, gagnera davantage confiance en elle et verra, par le fait même, sa motivation augmenter. Plus vous vous fixerez des objectifs modérés, plus votre rendement et votre satisfaction augmenteront.

Établir vos priorités

Les perfectionnistes s’attardent souvent à ce qui n’est pas essentiel. Ils investiront, par exemple, autant de temps et d’effort dans la préparation d’un examen qui vaut 10% de la note finale que dans la préparation d’un autre qui vaut 50%. Afin de répartir votre temps de manière plus profitable, dressez la liste des choses que vous avez à faire et établissez un ordre de priorités. Suivez cet ordre et assurez-vous de bien doser vos efforts. Une tâche jugée moins importante ne devrait pas être exécutée en premier et ne devrait pas prendre plus de temps qu’une autre jugée prioritaire. Pour de plus amples informations consultez le texte La gestion du temps.

Valoriser le sens de l’effort

Les perfectionnistes entretiennent à tort la croyance que tout est plus facile pour les autres. Pour eux, devoir fournir des efforts devient une preuve de leur inefficacité. Il est temps de revaloriser le sens de l’effort, car ce sont les efforts soutenus et non la possession d’une intelligence exceptionnelle qui sont la clé de la réussite scolaire. Derrière tout accomplissement résident de nombreuses heures de travail et de la persévérance.

Reconnaître les signaux de danger

Lorsque vous ressentez de l’insatisfaction, de la frustration, de l’abattement, de l’anxiété ou de l’épuisement, interrogez-vous, tentez d’identifier ce qui vous met dans cet état. Vérifiez, à titre d’exemple, si vous n’êtes pas en train de vous demander l’impossible ou si vous ne désirez pas obtenir une note parfaite. Demeurez alerte aux différents signaux du perfectionnisme.

Porter attention au plaisir ressenti

Une autre suggestion pour les perfectionnistes, celle d’imaginer et de réaliser des activités en fonction du potentiel de plaisir et de satisfaction qu’elles représentent et non en fonction de leur résultat. Obtenir un excellente note n’est ni nécessaire, ni suffisant pour qu’une personne puisse se sentir satisfaite et sûre d’elle. Il est donc conseillé d’évaluer votre succès non seulement en termes de ce qui a été accompli mais aussi en termes de plaisir ressenti dans la poursuite de ce but.

Apprendre de vos erreurs

Les perfectionnistes oublient que l’échec est normal et que faire des erreurs est un mal nécessaire. Bien des apprentissages ne peuvent se faire que si des fautes sont commises. Il devient donc impératif de vous donner le droit à l’erreur et d’accepter vos imperfections. À titre d’exercice, retracez une erreur récente et dressez la liste de ce que vous avez appris de cette expérience.

Conclusion

Il est préférable de valoriser et d’encourager davantage la compétence que la recherche incessante de l’excellence. Les personnes capables de raisonner et de s’exprimer correctement ont toutes les chances de devenir des professionnels de qualité qui accompliront leur travail adéquatement tout en s’épanouissant et en maintenant un bon équilibre physique et mental.


Références

  • Burns, D. (1992). Être bien dans sa peau, Saint-Lambert, Éditions Héritage.
  • Covez, S. (1995). Priorité aux priorités, New-York, First Éditions.
  • Ramirez Basco, M. (2000), Y a-t-il des perfectionnistes heureux?, Montréal, Le jour.
  • Young, J. E., et J. S. Klosko (1995). Je réinvente ma vie, Montréal, Éditions de l’Homme.

Rédigé par: Louise Careau, psychologue

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